mercredi 16 novembre 2016

Liberté, je crie ton nom

Je partage avec vous une micronouvelle sur le thème de la liberté, réalisée pour le 2e concours Radio France de la micronouvelle. C'est un hommage à la Commune de Paris et un clin d'oeil au poème de Paul Eluard, Liberté j'écris ton nom. J'ai utilisé les assonances et allitérations ainsi qu'un rythme haché sans verbes directs pour rendre le sentiment de l'instantanéité de l'action ainsi que l'impression de l'inéluctable dénouement.

Les poèmes des lauréats sont consultables ici.

Pour un meilleur confort de lecture, vous pouvez télécharger le texte au format PDF. Bonne lecture.

Liberté, je crie ton nom.

Les barricades. Un choeur. Une clameur.

Liberté, je crie ton nom.

Les claquements secs des carabines. Les balles qui fusent, furieuses. L'impact. Les corps percutés. L'ultime cabriole des moribonds. Un seul demeure. Dressé par-dessus les pavés, le poing levé, le destin m'a désigné pour un dernier défi.

Liberté, je crie ton nom.

Le fracas discordant du canon, les gravats et les cadavres projetés tel un feu d'artifice macabre, les éclats gravés dans ma trogne, mêlant mes larmes d'écarlate.

Liberté, je crie ton nom.

Mon bras qui s'envole au firmament, absurde simulacre d'évasion, ma carcasse affaissée en un déversoir sanglant. Mon bras qui retombe, poupée de chair inerte, toujours serré dans un cri du coeur muet, le cri d'un coeur qui cesse de battre.

Liberté, je crie ton nom.

Le son qui s'évade de mes lèvres murmurantes, mon serment qui se dilue, se délaye, dissimulé par le son du canon, le son du canon qui ne cesse, assourdissant.

Liberté, je crie ton nom...

samedi 12 novembre 2016

Liste de chaînes Youtube passionnantes

J'ai découvert sur Youtube au fil des années, de nombreuses chaînes de qualité qui me proposent de la vulgarisation sur diverses thématiques, des critiques d'actualité et du divertissement. Je suis toujours en recherche de nouveaux contenus et j'ai franchi récemment la barre des 150 abonnements. J'ai décidé de partager avec vous ces chaînes qui sont ma télévision au quotidien.

J'ai classé ces chaînes Youtube par thématique. Sauf exception, elles sont francophones. J'ai mis en gras quelques chaînes que je trouve exceptionnelles.

Vos conseils d'amélioration des descriptions et du classement sont les bienvenus (en commentaires). Si vous avez des chaînes à proposer pour intégrer cette liste, utilisez le formulaire de contact.

Note : Vous pouvez lire et télécharger cet article en version PDF pour un meilleur confort de lecture.

Table des matières

Astronomie

Biologie

  • DirtyBiology : La biologie, c'est sale. Et c'est rudement intéressant. Surtout quand c'est présenté de manière décalée et super bien documentée

Chimie, pharmacie

  • Climen : les médicaments expliqués de manière simple grâce à la chimie et à la médecine

Cinéma

Cultures de l'imaginaire

  • Nexus VI : La Science-Fiction sous toutes ses formes (films, livres...)

Curiosité, sujets multiples

  • Axolot : Axolot éveille la curiosité de ses spectateurs en sélectionnant des histoires étonnantes (mais réelles), des personnages incroyables et des lieux originaux
  • La chaîne de P.A.U.L : Divers sujets d'histoire récente et anecdotes variées
  • La Veillée : Des personnes au parcours incroyable ou exceptionnel racontent leur vie en toute simplicité et avec humour
  • Le top 5 : Vidéos de type "top" bien documentées sur des sujets variés
  • LinkstheSun : "Points culture" autour de nombreux sujets, critiques musicales et cinématographiques.
  • Mondes sociaux : Magazine numérique francophone en sciences humaines et sociales
  • Outside the Box : Vidéos sur divers sujets
  • Poisson fécond : Sujets variés
  • Romain TeaTime : Sujets variés
  • Vidéothèque d'Alexandrie : Collectif de vidéastes, vulgarisation de nombreuses thématiques et sciences différentes.

Droit

  • 911 Avocat :Vulgarisation du droit, notamment appliqué aux vidéos sur Youtube
  • Lex Tutor : Vulgarisation du droit, avec des approches originales

Ecologie, climatologie

  • Le Réveilleur : Prise de conscience des problématiques écologiques

Economie

  • Heu?reka : Pour comprendre l'économie et son fonctionnement
  • Stupid Economics : L'économie pour les débiles c'est pas très vendeur, mais les vidéos sont sympas

Esprit critique

  • Hygiène mentale : Apprendre à analyser un discours, à prendre du recul et à acquérir un esprit critique
  • La Tronche en Biais : Esprit critique, scepticisme et zététique

Histoire, Archéologie

Humour, parodie

Inclassables

  • Le grand JD : Cette chaîne est un fourre-tout de beaucoup de trucs, il y a de véritables perles dans le tas.
  • MisterJDay : Y'a plein de trucs sur cette chaîne : des clips, des analyses de pub, des critiques musicales...
  • Primitive technology : Technologie primitive en français. Si vous voulez voir comment on fabrique un arc, une maison ou du charbon en partant de rien, cette chaîne est pour vous

Jeux vidéo

  • BenzaieTV : Critiques et découvertes de jeux vidéo d'actualité. La chaîne propose également des ouvertures de versions "collector" et des critiques de films récents
  • Doc Geraud : vidéos éducatives autour du Game-design
  • Frenerth : Matériel informatique pour les jeux vidéo
  • Game Next Door : Questions de game-design et découverte de jeux vidéo
  • Gamelove : Accueille la chronique critique d'actualité des jeux vidéos Free2pay, réalisée par l'équipe d'Undropdanslamare.
  • Joueur du Grenier : Y'a encore des gens qui connaissent pas JDG ? Retrogaming en mode vénère
  • Ockam Razor : Vidéos sur la créativité et la création au sens large. Cette chaîne ne se limite pas au jeu vidéo
  • Pause Process : Techniques de création de jeux vidéo
  • UnDropDansLaMare : Chroniques de critiques du monde du jeu vidéo

Langue française, littérature

  • Code MU : Curiosités autour des mots, leur orthographe, leur étymologie
  • Brigade du livre : Découverte de livres et d'écrivains
  • Linguisticae : Sciences du langage, explication des mots, de la grammaire et des expressions

Mangas et BD

  • Northern Rufio : Découverte de l'univers des mangas. Un peu de jeu vidéo dans les coins

Mathématiques

Musique

  • Adrian von Ziegler : Musiques d'ambiance de style celtique et fantastique proposées en écoute gratuite par l'auteur
  • Goguettes en trio : Chansons à texte parodiques d'actualité sur des airs connus
  • Jimmy Magardeau ツ : Délires et défis musicaux en tous genres. Incatégorisable
  • Noflipe : Rap français anglophone. Cherche pas à comprendre, écoute !
  • Stupeflip : Le meilleur rap de variété en écoute gratuite

Ornithologie, ethologie

  • A chick called Albert : L'élevage d'oiseaux, avec pour personnage principal, une caille de supermarché nommée Albert
  • Penseur sauvage : Relation homme-animal, quelques vidéos sur la politique

Paléontologie

  • Jurassik Tube : Dinosaures et autres animaux qui n'existent plus

Philosophie

  • Cyrus North : Découverte de la philosophie
  • DanyCaligula : chaîne de philosophie à l'origine, l'auteur fait également des vidéos autour de la sociologie et de la politique. Très engagé politiquement

Physique

  • Scilabus : Beaucoup de physique et quelques autres choses. Approches originales et intéressantes.

Podcasts

Politique, actu, société

  • Bonjour Tristesse : Chronique d'actualité à la fois critique et humoristique, en mode révolté avec des punchlines qui tuent
  • Data Gueule : Chronique d'actualité critique sur des sujets de société, très bien documentée et réalisée.
  • HugoDécrypte : Décryptage de l'actualité et de la politique
  • J'ai pas voté Documentaire : critique du système électoral et politique français
  • Osons causer : Critiques politiques et d'actualité. Très orienté politiquement
  • Trouble Fait : Critique des médias et analyse politique
  • Usul2000 : Critique de personnalités politiques. Très bonne qualité avec un traitement relativement partisan
  • What The Fact : Critique et démystification d'évènements d'actualité

Psychologie

  • Psy Lab : Pour découvrir la psychologie et diverses pathologies et névroses
  • Sapiens sur un caillou : La psychologie à travers des sketches complètement barrés

Sciences dures variées

  • Dr Nozman : des expériences amusantes et variées et des vrais ou faux sur des sujets scientifiques
  • E-penser : de la physique quantique et pas mal d'autres sujets scientifiques. C'est vraiment très très bon.
  • La Minute Science : Courtes vidéos sur des thématiques scientifiques
  • Lanterne cosmique : Une chaîne difficile à classer, sur des sujets majoritairement scientifiques
  • Prof Okita : Sciences variées, notamment vues à travers les jeux vidéo
  • ScienceEtonnante : Beaucoup de physique, des mathématiques et quelques autres sujets. Ce qui fait la différence avec cette chaîne, c'est l'exceptionnelle qualité de sa vulgarisation et la clarté de son discours.

Sociologie

  • Horizon-gull : vidéos de hacking social, proposant de comprendre le fonctionnement de la société.
  • Le Stagirite : Entre sociologie, analyse de discours et politique
  • Point de vue social : Information sur le milieu du travail et sur l'aide à la personne

Youtube, Internet

  • Absol Vidéos : Critiques argumentées de divers phénomènes sur Internet et Youtube, ainsi que sur d'autres sujets
  • Anthox Colaboy : Critiques positives et négatives de châines Youtube, ainsi que de divers sujets d'actualité ou de société sur Youtube
  • Jeannot Nymouce : Culture et mèmes de l'Internet
  • Mathieu Sommet : Critiques humoristiques et engagées sur des vidéos Internet
  • MrAntoineDaniel : Revue de vidéos Internet, agrémentée de courts-métrages
  • Sofyan : Apprendre à faire des vidéos sur Internet

samedi 5 novembre 2016

Méthode d'inclusivité en jeu de rôle

Avant-propos : Cette méthode fait suite à celle de Sildoenfein. Il a le premier formalisé des outils pour garantir une inclusivité dans ses parties, il a rendu public ces outils sur le forum des Ateliers Imaginaires. Je l'en remercie. La discussion qui s'en est suivie m'a incité à mettre en forme mon point de vue et à créer cet article.

Pour les plus pressés, l'outil est téléchargeable ici. Pour le mode d'emploi, voir partie "Mode d'emploi". Pour un meilleur confort de lecture, vous pouvez télécharger l'article au format PDF.

Table des matières

Introduction

L'inclusivité est le fait d'impliquer dans la société l'ensemble des individus, sans discrimination de sexe, de préférences sexuelles, d'identités de genre, de handicaps, de couleur de peau, de religion ou d'origine ethnique. En jeu de rôle, l'inclusivité se traduit par le fait d'intégrer ces différentes constituantes dans l'univers du jeu.

L'inclusivité en JDR a 2 objectifs :

  • La lutte contre les préjugés et les discriminations
  • L'enrichichissement de l'univers du jeu, en évitant la discrimination inconsciente que nous faisons tous (par exemple, avec un excès de PNJ* masculins hétérosexuels blancs). *PNJ : Personnage non joueur

Les critères de l'inclusivité

Afin de parvenir à une meilleure inclusivité dans nos parties de JDR, on peut se baser sur plusieurs critères :

  • Le critère de présence permet de définir si une catégorie sociale est présente dans le jeu. Par exemple : y a-t-il un homosexuel parmi les PNJ ?
  • Le critère quantitatif consiste à définir si chaque catégorie sociale est suffisamment bien représentée, en termes de nombre d'individus. On peut appliquer à ce critère plusieurs méthodes :
    • La méthode proportionnelle : chaque catégorie est représentée en fonction de ses proportions dans la société réelle. Par exemple : 5% d'homosexuels.
    • La méthode égalitaire : chaque catégorie est représentée à parts égales
    • La méthode de sur-représentation : par compensation par rapport à la discrimination que peuvent subir certaines catégories, elle sont présentes dans le jeu dans une proportion plus importante que dans la réalité
  • Le critère qualitatif consiste à mesurer non pas le nombre d'individus de chaque catégorie sociale, mais l'importance que chaque catégorie sociale prend dans l'histoire. Par exemple : l'homosexuel est un PNJ central de l'histoire.
  • Le critère du stéréotype consiste à mesurer la manière dont le personnage est présenté dans l'histoire, de manière à lutter contre le stéréotype qu'il véhicule. Par exemple : le personnage homosexuel est un père de famille responsable dans le jeu. Pour être efficace, le critère du stéréotype doit donc s'appuyer sur une liste de stéréotypes.
  • Le critère d'empathie consiste à créer chez les joueurs un sentiment fort d'identification à un personnage appartenant à une certaine catégorie sociale, à créer chez le joueur une émotion et une compassion pour les problèmes vécus par le personnage.

Les limites de l'inclusivité

La première limite de l'inclusivité, c'est le temps de préparation de la partie. Il est plus facile de prendre en compte de nombreux critères favorisant l'inclusivité, lorsque les PNJ ont été longuement conçus dans cet objectif. Lors d'une partie improvisée, la préparation est presque nulle ; le Meneur de Jeu et les joueurs doivent réagir très rapidement, notamment lorsqu'ils improvisent un PNJ.

La deuxième limite de l'inclusivité, c'est l'ignorance. Lorsqu'on ignore les problématiques d'une catégorie sociale, voire l'existence même de cette catégorie sociale, il est difficile de corriger des préjugés.

La troisième limite de l'inclusivité, c'est le préjugé. Nous fréquentons souvent des gens issus de la même catégorie sociale que nous. Nous finissons par considérer cette catégorie sociale comme une norme, ce qui fausse l'idée que nous nous faisons de la société dans son ensemble. Ce préjugé prend la forme de croyances : exagération de l'importance de la catégorie sociale à laquelle nous appartenons, image déformée des autres catégories sociales, en leur associant des torts ou des défauts imaginaires. Ces préjugés nous impactent tous, pas seulement l'homme blanc hétérosexuel. Si vous ne vous sentez pas concerné, c'est que vous l'êtes au plus haut point.

La quatrième limite de l'inclusivité, c'est la catégorisation. Le fait de définir des catégories sociales, de ranger les gens dans des cases en fonction de leur âge, de leur taille ou de leur couleur de peau, c'est déjà une discrimination, même sans préjugé. Le meilleur moyen d'atteindre l'inclusivité est de lutter contre ces catégories. Cela demande un long travail de réflexion et d'introspection.

La cinquième limite de l'inclusivité, c'est la limite de la fiction. La fiction (l'histoire racontée par les joueurs) a une certaine durée (la durée de la partie) et contient un nombre limité d'éléments (personnages, quêtes, lieux, scènes, situations, objets...). Il est impossible de résoudre toutes les injustices sociales dans une seule partie et l'inclusivité est toujours partielle, imparfaite.

La sixième limite de l'inclusivité, c'est nous. Nous sommes tous différents. Nous venons tous de catégories sociales différentes. Nous sommes tous sensibles à des sujets différents, nous avons tous des préjugés différents. Nous jouons tous au jeu de rôle différemment. Nous avons tous des attentes en matière d'inclusivité différentes. La méthode qui me convient n'est pas forcément celle qui te conviendra à toi, cher lecteur.

Ne cherchons pas à faire disparaître ces limites, c'est impossibe ; acceptons-les comme faisant partie de nous. Le jeu de rôle est avant tout un loisir, un jeu. Nous n'avons jamais assez de temps pour préparer la partie, nous n'avons pas forcément envie de nous renseigner en détails sur tous les handicaps, sur l'ensemble des orientations et identités sexuelles. Nous aurons toujours des préjugés, quels que soient nos efforts pour nous débarrasser des plus imbéciles d'entre eux. Nous catégoriserons toujours. Prenons du recul et agissons à notre échelle.

Une méthode d'inclusivité efficace doit donc améliorer l'inclusivité à travers un outil simple et pratique. Elle ne doit pas rechercher l'inclusivité idéale, inatteignable, qui nécessiterait un outil extrêmement complexe.

La méthode Brisecous

Afin que cet outil soit le plus pratique possible, je me suis imposé 3 contraintes :

  1. Il doit tenir sur une page
  2. Il doit être utilisable par tout le monde
  3. Il doit nécessiter le moins d'actions possible pour être utilisé

J'ai choisi d'axer ma méthode sur 3 critères principaux :

  1. Le critère qualitatif
  2. Le critère du stéréotype
  3. Le critère d'empathie

J'estime que le critère quantitatif n'est pas la bonne approche, cela alourdirait la méthode et ça ne modifie pas les préjugés (exemple caricatural : 50% de femmes au foyer dans un jeu). Selon moi, le but est avant tout que le joueur accepte de ne point porter de jugement, qu'il change sa vision des choses, qu'il porte un regard bienveillant et positif sur les minorités et les différences. L'ignorance ne nuit pas, le jugement est en revanche source de beaucoup de souffrances pour celui qui est ainsi rejeté.

Le critère du stéréotype nécessite de lister les préjugés sur certaines catégories sociales. Comme une telle liste peut être considérée comme discriminante, voire insultante, j'ai choisi de créer des anti-stéréotypes positifs à intégrer au jeu.

Liste d'anti-stéréotypes non exhaustive :

  • Cette femme a un rôle de chef
  • Cet homosexuel est un père de famille responsable
  • Ce(tte) noir(e) a une thèse de doctorat en physique quantique
  • Cette personnalité politique est honnête et il agit par conviction
  • Cet adolescent(e) réfléchit beaucoup et s'intéresse à beaucoup de choses
  • Cet handicapé(e) a un emploi utile et haut placé
  • etc...

Ces anti-stéréotypes sont également discriminants en soi. J'ai finalement décidé de ne pas fournir de liste. A chacun de prendre du recul sur ses préjugés et de créer ses anti-stéréotypes.

Le critère qualitatif nécessite de définir l'importance du personnage dans la fiction :

  1. Personnage central. Il a un rôle majeur dans l'une des intrigues principales du scénario ou de la partie, il accompagne souvent les joueurs.
  2. Personnage secondaire récurrent. Il revient souvent dans l'entourage des joueurs et il est lié à plusieurs quêtes ou intrigues
  3. Personnage secondaire. Les joueurs l'approchent de près mais ne seront pas amenés à le rencontrer à nouveau, ou rarement.
  4. Elément du décor. Il fait partie de la foule des personnages, c'est le personnage qui se résume à un nom, à un métier et éventuellement à une ou deux particularités physiques. Comme je ne me préoccupe pas de l'aspect quantitatif, je ne prendrai pas en compte ce 4e choix.

Partant du constat des limites de l'inclusivité (voir partie précédente), j'ai simplifié les différentes catégories sociales afin de rendre l'outil plus léger d'utilisation. Il est impossible d'intégrer toutes les minorités à un tel outil. Ma grille d'analyse est plus générale que ce que propose Sildoenfein, elle me semble suffisante pour atteindre ses objectifs (garantir un paysage de PNJ variés et le respect des minorités).

L'outil et son mode d'emploi

Cet outil vous permet de connaître la diversité des personnages et de leurs particularités au sein de la partie. Il permet également de sensibiliser les joueurs aux discriminations subies par les minorités. C'est un outil global. Il ne s'agit pas d'une fiche de PNJ. Cet outil ne garantit pas une inclusivité parfaite, il propose d'améliorer l'inclusivité en étant simple d'utilisation, clé-en-main et utilisable par tous.

L'outil est téléchargeable ici.

Je vous transmets également les deux outils proposés par Sildoenfein pour gérer l'inclusivité : ici et ici. A vous de choisir l'outil qui vous convient le mieux.

Cet outil est 3-en-1. Il prend la forme d'une feuille A4 que vous pouvez librement utiliser dans le cadre privé, lors de vos parties par exemple. Il est conçu pour être rapide d'utilisation et modulaire. Il contient 3 modules :

  • Le contrôleur de diversité permet de vérifier la visibilité de chaque catégorie sociale au sein de la partie. Lorsque vous créez un PNJ, notez 1 chiffre compris entre 1 et 3, dans 1 case pour définir les informations suivantes :
    • La classe d'âge du personnage
    • Son sexe
    • Son orientation sexuelle et/ou identité de genre
    • Sa couleur de peau
    • Son importance au sein de l'histoire, définie par le chiffre noté (3 = personnage central, 2 = personnage récurrent, 1 = personnage secondaire)
    • Vous pouvez également attribuer des handicaps physiques ou mentaux en rayant le handicap choisi dans la liste
  • Les anti-stéréotypes vous permettent de lutter contre un stéréotype affectant une catégorie sociale (voir exemple sur l'outil). Créez un PNJ possédant cet anti-stéréotype pour lutter contre les préjugés les plus fréquents. Notez l'importance du PNJ dans la case (3, 2, 1) afin de connaître la visibilité de chaque anti-stéréotype dans le jeu. Ces anti-stéréotypes sont à manier avec précaution. Si vous les utilisez trop, vous obtiendrez l'effet inverse.
  • Le générateur d'empathie propose des situations à faire vivre aux joueurs afin de créer de l'empathie, de la compassion ou une interaction entre le joueur et la particularité de chaque PNJ. Notez l'importance du PNJ dans la case (3, 2, 1) afin de vous souvenir quelles situations sont déjà présentes ou non dans la partie.

Dans une partie improvisée avec un rythme très rapide, le MJ peut utiliser uniquement le contrôleur de diversité. Dans les autres cas, il est conseillé d'utiliser les 3 modules.

jeudi 27 octobre 2016

Le travail

Le travail a été à l'honneur dans les médias avec la loi Travail en France. Cela m'a donné l'envie d'écrire un article sur le sujet. Cet article se veut un outil de réflexion personnelle, que je partage humblement avec ceux que le sujet intéresse. Je ne suis pas sociologue et je n'ai pas lu les nombreux livres de sociologie sur le travail.

Note : Vous pouvez télécharger cet article au format PDF pour un meilleur confort de lecture.

Le travail vient du latin Trepalium, qui était un instrument de torture. Je ne m'attarderai pas sur les raisons de cette étymologie... La définition que j'utiliserai est celle-ci : Un travail est le fait d'utiliser du temps dans le but de répondre à un besoin. L'exemple de travail que nous connaissons le mieux est celui du salariat : nous échangeons notre temps et notre force de travail contre un salaire, ce salaire nous permet de répondre à nos besoins (besoins primaires comme la nourriture mais aussi besoins secondaires comme les loisirs).

Table des matières

Préhistoire du Travail

Pendant le Paléolithique, le travail consiste à répondre à un besoin primaire. Il se fait de manière directe, sans intermédiaires : si l'individu a faim, il consacre du temps à obtenir de la nourriture : il cueille des fruits, il chasse, il pêche. Si l'individu a froid, il accumule du bois en vue de faire un feu. Une fois que les besoins primaires sont assouvis, l'individu peut consacrer le reste de son temps à des activités qui ne sont pas du travail : créer du lien social, vénérer les dieux, réaliser des oeuvres artistiques, faire la fête... L'individu travaille le minimum possible et produit uniquement ce dont il a besoin ou envie.

Au Néolithique, entre 12.000 et 9.000 avant notre ère, l'humanité découvre l'agriculture, l'élevage et la céramique. Avec l'amélioration des techniques d'agriculture et d'élevage, la sélection des variétés de plantes cultivées et des races d'animaux élevées, l'être humain augmente sensiblement la production de nourriture. Le temps de travail augmente également, car le rendement est exponentiel et non pas proportionnel au temps de travail consacré : produire deux fois plus ne prend qu'un peu plus de temps. On ne produit plus uniquement pour répondre à des besoins primaires, on produit pour obtenir des surplus. Puisqu'on produit plus de nourriture que nécessaire, une partie de la population n'a plus besoin de travailler aux champs. Mais pas question que le paysan donne gratuitement la nourriture qu'il a laborieusement semée, protégée et ramassée ! Une partie de la population se spécialise donc dans d'autres professions : soldat pour protéger les récoltes, chef pour gérer les conflits, prêtre pour attirer la grâce des dieux, artisan pour fabriquer des objets nécessitant une grande maîtrise technique, mère pour élever plus d'enfants qu'on peut désormais nourrir... C'est la naissance des métiers, ainsi que la naissance du travail tel qu'on le conçoit aujourd'hui.

Au Néolithique, l'individu ne travaille plus seulement pour lui-même, pour répondre à ses besoins primaires. Il travaille pour fabriquer des objets ou des services, il échange ces objets ou ces services contre d'autres objets ou services produits par d'autres individus, afin de satisfaire tous ses besoins.

Le chasseur-cueilleur paléolithique était partie intégrante de la nature, un animal parmi d'autres. L'agriculteur néolithique est maître de la terre, des animaux et des végétaux, il dompte la nature et la transforme selon son bon vouloir. Le Paléolithique produisait seulement ce dont il avait besoin, le Néolithique produit autant qu'il le peut. Le Paléolithique gagnait sa place dans la société par les dons qu'il faisait à ses camarades, symboles de sa richesse et de sa grandeur d'âme. Le Néolithique gagne sa place dans la société par ce qu'il possède, qu'il l'ait produit ou qu'il l'ait pris à autrui. Le besoin de produire des surplus va de pair avec le besoin de posséder : pourquoi produire si l'on n'a pas intérêt à le faire, si le fait de posséder n'a pas d'importance ?

La possession devient le moteur des nouvelles sociétés Néolithiques : tout ce qui permet de produire des surplus est gage d'une élévation dans la société. On possède la terre, on possède ce qu'elle produit. Bientôt, on possède également les hommes, ceux qui n'ont pas de terre et que l'on fait travailler en échange d'une partie du fruit de leur travail, ceux à qui on prend les terres ou le travail par la force. Les familles sont maintenant dominées par des chefs de tribu, et leur protection - forcée - a un coût. Ces chefs de tribu passent eux-mêmes sous la houlette de chefs de clan, qui sont eux-mêmes soumis par les rois de vastes royaumes. C'est le début de la hiérarchisation de la société.

Le travail n'appartient plus seulement à qui le produit, il est partagé en plusieurs parties et seule une de ces parties appartient au travailleur. Il est désormais nécessaire de quantifier le travail de manière plus durable que le troc, afin que chaque partie soit, sinon distribuée de manière équitable, au moins de manière cohérente. Les premiers systèmes monétaires apparaissent, avec des objets dont la valeur connue de tous permet de servir de monnaie d'échange : "- Je t'achète ton sac de lentilles en échange de 3 coquillages. - Non pas question, 3 coquillages c'est la valeur d'un sac de blé, les lentilles c'est au moins 4 coquillages !" Peu à peu, ces objets de valeur connue deviennent les premières pièces de monnaie, c'est-à-dire des objets qui sont fabriqués spécialement pour quantifier la valeur des autres objets.

Le marché est né : la rencontre de l'offre (le vendeur) et de la demande (l'acheteur) qui se retrouvent et s'accordent sur le prix des denrées. Le travail a désormais une valeur, quantifiable en théorie, qui varie selon divers critères. Le travail a également un prix, celui auquel le travail est acheté et vendu, qui peut être ou non représentatif de sa valeur réelle.

Le travail aux XIXe et XXe siècle

Aux XIXe et XXe siècle, l'industrialisation amène une nouvelle révolution : grâce au travail à la chaîne, aux machines-outils, à l'amélioration technologique, la productivité augmente énormément. Cette évolution entraîne plusieurs changements :

  • Le travail se complexifie. La majeure partie de la production n'est désormais plus assurée par l'individu seul, l'individu devient un rouage d'une vaste machine de production
  • L'individu n'est pas le propriétaire de son outil de travail car l'appareil de production coûte très cher et nécessite de nombreux individus pour fonctionner
  • Le niveau de vie augmente car la production de masse permet de faire baisser le coût des denrées, ce qui permet à une plus large partie de la population d'y avoir accès. Il faut par ailleurs trouver des débouchés à cette production massive, en permettant l'achat de cette production par les classes moyennes.

Grâce au développement de la démocratie en Europe occidentale, les travailleurs gagnent de nouveaux droits aux XIXe et XXe siècles : réduction du temps de travail, droit de grève, premières semaines de congés payés en 1936, allocations chômage, 39 puis 35 heures... La hiérarchie n'est plus toute-puissante grâce à la création de contre-pouvoirs de plus en plus organisés : les syndicats. La hiérarchie peut être remise en question et le travailleur dispose de moyens de pression sur son employeur.

En 1950, les sociologues et les politologues affirmaient qu'en 2000, l'homme travaillerait 4 heures par jour en raison de l'automatisation grandissante du travail : on produirait plus avec moins de main-d'oeuvre. A partir de 1970, l'informatisation a permis d'augmenter la production en réduisant le temps de travail.

A partir des années 50, avec la mondialisation, les gros groupes industriels commencent à délocaliser leurs industries dans les pays pauvres : pourquoi payer un travailleur au SMIC français quand on peut le payer 50 fois moins en Chine ou au Vietnam ? Les années 1980 marquent la fin du plein-emploi et l'industrie française s'effondre. Presque tous les produits qu'on achète au quotidien sont fabriqués en Chine, les français travaillent majoritairement dans le commerce et la prestation de services. En 2016, 10% de la population active est au chômage, 65% de la population en âge de travailler (15-64 ans) a un emploi (source INSEE).

Le travail au XXIe siècle

Au XXIe siècle, l'économie fonctionne selon un système capitaliste. Elle est contrôlée par de grandes sociétés multinationales. Ces sociétés emploient des dizaines de milliers de personnes et elles ont donc un poids politique important. Elles sont possédées par des actionnaires qui détiennent une partie de l'entreprise. L'objectif de ces actionnaires est de gagner de l'argent grâce aux bénéfices (appelés dividendes) générés par la société dont ils sont les co-propriétaires. Comme les actionnaires ne travaillent pas dans l'entreprise, ils recrutent des personnes pour la gérer à leur place. En raison de la taille de ces multinationales, le poids de l'individu, du travailleur est négligeable. La hiérarchie surdéveloppée - parfois 10 échelons au-dessus de lui - empêche le travailleur de faire valoir son point de vue, car à aucun moment il n'a affaire à un supérieur suffisamment haut-placé dans la hiérarchie pour avoir un quelconque pouvoir décisionnel. Les individus réduits à l'état de ligne budgétaire sont déshumanisés et les exigences de profit ne tiennent plus compte de ce que vivent ou ressentent les individus. Seul compte le bénéfice réalisé par l'entreprise.

Le monde est désormais un marché ouvert : tout le monde peut acheter et vendre à tout le monde. Des organisations internationales s'assurent que les états respectent les accords internationaux qu'ils ont signés.

Dans un tel contexte, il est difficile pour un pays comme la France de mener une politique de développement des droits sociaux. La France étant liée par des accords internationaux qu'elle n'a pas les moyens de rejeter, l'économie française se retrouve en concurrence avec les économies du monde entier. Il est impossible de lutter, économiquement parlant, contre un pays comme la Chine dont les ouvriers font des semaines de 70 heures pour un salaire mensuel de 50 €. Les produits fabriqués en Chine seront toujours beaucoup moins chers que les produits fabriqués en France.

L'informatisation et l'automatisation ont supprimé beaucoup d'emplois : ordinateurs, caisses automatiques, distributeurs automatiques, usines automatisées... Ces suppressions d'emplois ont permis aux sociétés de créer plus de bénéfices en réduisant la masse salariale. La pression sur le travailleur s'est accrue : dans un monde où le travail devient une denrée rare, le rapport de force entre travailleur et employeur se déséquilibre. Le travailleur n'ose plus mettre en danger sa situation pour faire valoir ses droits, car le risque de perdre son emploi est trop important.

La France est devenue une société d'hyperconsommation dans laquelle l'individu, transformé en consommateur, est manipulé par la publicité omniprésente afin de créer chez lui de nouveaux besoins. Le marketting est devenu une science, un "neuromarketting" qui cherche les failles du cerveau pour mieux exploiter la faiblesse humaine. La publicité a permis depuis plus de 60 ans l'endoctrinement, le formatage des individus dans un modèle de consommation dont il devient difficile de se départir.

Un système social comme celui de la France est financé en partie par les taxes sur les bénéfices des sociétés. La disparition des frontières économiques permet désormais aux grosses sociétés multinationales de réaliser des montages financiers complexes et légaux qui leur permettent de ne pas payer d'impôts en France : ces sociétés à travers diverses filiales, réalisent les profits en France mais les déclarent dans d'autres pays, dans lesquels les impôts sur les bénéfices sont très faibles. C'est ainsi que des sociétés comme Amazon, Apple, Facebook, Google ou McDonald ne paient quasiment aucun impôt en France. Légalement... (Sources : Cam'intéresse, BFMbusiness, Lefigaro)

Les produits que les français achètent sont fabriqués à l'étranger. Les grosses sociétés qui vendent ces produits ne paient quasiment pas d'impôts en France, ce qui leur permet d'être plus concurrentielles que les petites sociétés qui paient leurs impôts. La France n'a pas les moyens de lutter contre ces problèmes car elle est liée par des accords internationaux. Le système social protecteur des français est alors menacé : la disparition des emplois augmente le coût de ce système, alors que l'argent disponible pour le financer diminue. Les grosses multinationales, dans un contexte économique tendu, sont à même de sécuriser encore plus leur position en pratiquant un lobbying intense auprès des décideurs politiques, sous la forme de promesses et de chantage à l'emploi.

Valeur et prix du travail

Dans une société où l'on ne produit pas tout par soi-même, la valeur du travail est quantifiée afin de permettre l'échange des biens et des services issus du travail de chacun. Cette quantification est en quelque sorte le coût ou le prix du travail, et elle peut s'opèrer en fonction de plusieurs critères :

  • Le temps consacré à la réalisation du travail : un bel objet ayant demandé 50 heures de fabrication sera plus coûteux qu'un objet simple fabriqué en 1 heure. Ce temps de réalisation peut inclure le temps nécessaire à l'extraction des matières premières : des matières premières difficiles à extraire comme le métal seront plus coûteuses que de l'argile facile à trouver et à extraire. Ce temps de réalisation correspond également à la notion de productivité : si l'on produit 3 objets en 1 heure au lieu d'en produire 2, la valeur de notre heure de travail aura augmenté (et la valeur de chaque objet produit aura diminué, étant donné qu'un objet vaudra 20 minutes de travail au lieu de 30 minutes précédemment).
  • L'expertise du travailleur : une compétence rare et demandant de nombreuses années d'expérience pour la maîtriser, augmentera le coût du travail.
  • La rareté du travail : Si un produit demandé est rare, il y aura plus de gens qui veulent acheter le fruit de ce travail (la demande) que de gens capable de vendre le fruit de ce travail (l'offre). Il faudra payer plus cher que le voisin pour obtenir le fruit de ce travail. C'est également valable pour un travail nécessitant des matières premières dont la quantité serait limitée.
  • L'accaparement du travail : Dans le cas où une personne impose sa volonté au travailleur (c'est ce qu'on appelle la hiérarchie), elle pourra faire baisser le coût du travail, en le payant à un prix moins élevé que sa valeur totale.
  • Le besoin auquel répond le travail : Plus un individu estime avoir besoin du fruit du travail, plus il est susceptible de l'acheter, et plus il sera prêt à payer cher pour l'obtenir. Les besoins primaires (manger, boire, dormir...) sont toujours assouvis en premier, les besoins secondaires (loisirs...) sont toujours assouvis en second. Le marketting, la publicité, a pour objectif de créer un sentiment de besoin afin de vous inciter à acheter prioritairement un produit dont l'intérêt réel est secondaire.

Pour survivre, le travailleur doit vendre le fruit de son travail à un prix qui lui permettra d'acheter le fruit du travail des autres, afin d'assouvir au moins ses besoins primaires, et si possible ses besoins secondaires. Le travailleur a deux solutions pour améliorer sa capacité à assouvir ses besoins :

  • Il produit plus de travail
  • Il augmente le prix auquel il vend son travail

Société de possession

Nous vivons dans une société de possession héritée du Néolithique. Posséder est la justification de toutes les inégalités ainsi qu'un frein à la notion même de démocratie. Un individu qui possède a le droit d'être inactif, de ne pas produire un travail utile à la société : c'est ce qu'on appelle un rentier. En revanche, un individu qui ne possède pas n'a pas le droit d'être inactif, il est perçu comme un parasite : c'est ce qu'on appelle un chômeur. La possession justifie cette inégalité criante de traitement entre deux personnes qui ne produisent aucun travail utile pour la société. Cette différence de traitement ne nous choque plus car elle est un héritage culturel, une prolongation du seigneur médiéval et avant cela du chef de clan Néolithique.

Cette notion de possession nous interdit de subvenir par nous-mêmes à nos besoins et nous rend dépendants d'un système social globalisé : il nous est impossible de produire notre nourriture sans posséder, car les terres appartiennent à quelqu'un. Nous ne possédons même plus l'endroit dans lequel nous dormons, et pour lequel nous sommes obligés de payer un loyer, représentant un tiers du produit de notre travail. La notion de possession nous enchaîne à l'obligation de travailler car elle nous empêche d'assouvir nos besoins en dehors d'un système social extrêmement restrictif.

Malgré ses limites, la notion de possession semble indispensable au fonctionnement d'une société moderne. Toute approche qui consisterait à se libérer de son emprise semble vouée à l'échec, le fruit d'un idéalisme naïf : la redistribution des richesses prônée par le communisme mena à l'émergence d'une nouvelle caste de possesseurs. Il s'agirait alors de lutter non pas pour la fin de la société de possession, mais plutôt pour redéfinir le cadre et les conditions de cette possession. Il s'agirait non pas de prôner la fin des inégalités, mais plutôt de les encadrer dans des limites socialement acceptables.

Travail et rentabilité

Actuellement, les indicateurs économiques servent de référence en politique, prioritairement à tous les autres indicateurs (comme les indicateurs sur le bien-être de la population, par exemple). Tout travail ne générant pas d'argent, qui ne puisse se résumer à un chiffre sur un document comptable, est donc considéré comme secondaire. En ligne de mire, les emplois publics dans l'enseignement, la santé, la recherche, et plus globalement tous les fonctionnaires et employés municipaux. De la même façon, un artiste ou une aide à la personne ne rapportent pas d'argent. Le travail doit être rentable, quantifiable par un rapport entre coût et bénéfice, car une valeur sociale (comme la santé) n'est pas quantifiable économiquement. La raison de cette dérive ? La simplification. Les sciences sociales sont un sujet complexe. Les chiffres, eux, peuvent être comparés. Ils perdent pourtant leur sens et leur valeur lorsqu'ils sont employés en dehors de tout cadre social. Derrière les économies d'un licenciement, il y a la détresse d'un être humain. Cette dernière ne peut pas être quantifiée, elle ne mérite pas pour autant d'être ignorée.

On en vient alors à ce paradoxe : dans un pays qui compte 6 millions de chômeurs, on continue à supprimer des emplois au nom de la rentabilité. Quand il ne s'agit pas d'une rentabilité interne à l'entreprise, il s'agit de la rentabilité de l'état : sa capacité à passer sous la barre des 3% de déficit public.

Le travail peut-il se résoudre à ce seul critère de la rentabilité ? Nous vivons dans un pays dans lequel des millions de personnes sont poussées à la précarité faute d'avoir un emploi. Ces personnes ne produisent pas et n'ont pas les moyens d'assurer leur subsistance. Elles sont alors dépendantes des autres pour vivre. Paradoxe : on considère qu'il est plus rentable de priver ces personnes de leur travail, tout en leur reprochant de ne pas produire. Cette dépendance est entretenue par notre système social, puisque le critère de rentabilité détruit les emplois par lesquels elles auraient pu se rendre utiles à la société. Appauvries, elles ne paient plus d'impôts sur le revenu, elles ne consomment plus et ne génèrent plus de TVA par leurs achats, les entreprises vendent moins et génèrent moins d'impôts sur les sociétés... L'état gagne donc moins d'argent, il réduit ses dépenses en supprimant des emplois publics, ce qui augmente à nouveau le chômage tout en réduisant la consommation.

Culpabilisation du chômeur

Le chômeur est souvent perçu comme un parasite social, abusant d'un état-providence à bout de souffle qu'il faudrait démanteler. Cet état-providence serait la cause de tous nos problèmes économiques, en rongeant les bénéfices des entreprises et leur capacité à investir.

Ce constat serait valable et le chômeur serait effectivement un profiteur, si et seulement si il y avait du travail pour tout le monde. On pourrait alors estimer que le chômeur profite de la situation et vit en parasite sur le dos de la société.

En 2012, il y avait 820.000 emplois vacants en France selon un rapport du Conseil d'Orientation pour l'Emploi. Au même moment, il y avait 4,4 millions de chômeurs (catégories A, B et C) (source : Le monde). La France a détruit plus d'emplois qu'elle n'en a créés entre 2012 et 2016, et la courbe commence à peine à s'inverser. On peut donc considérer que si les chômeurs ne trouvent pas d'emploi... c'est parce qu'il n'y en a pas. Peut-on alors leur reprocher de ne pas travailler ? La plupart d'entre eux ne demandent que ça : travailler pour gagner honnêtement leur vie.

Au-delà des chiffres, de ce qu'on en fait et de l'idéologie qu'ils servent, il faut se poser la question de l'utilité d'enfoncer dans le mépris et la dévalorisation 5,5 millions de personnes (chiffres du chômage en 2016). Cela servira-t-il la société ? Les chômeurs seront-ils motivés à trouver du travail avec un tel poids sur la conscience ? S'enfoncer dans la souffrance, la déprime et l'exclusion sociale n'amène personne à innover, à entreprendre et à trouver sa place dans une entreprise. La confiance en soi, la valorisation, le respect que l'on reçoit, l'aide qu'on nous apporte, voilà ce qui permet aux gens fragilisés par les aléas de la vie de se relever et de se reconstruire. Car le travail, au-delà d'être un moyen de subsistance, est l'un des piliers fondateurs par lesquels nous construisons notre existence et nos relations sociales. Il est un révélateur de notre confiance en nous, de notre bien-être et de notre bonheur. Nous en priver est un crime.

Partant du principe qu'il n'y a plus assez d'emploi pour tous, veut-on une société basée sur l'ultra-compétitivité, avec une concurrence à l'emploi que ne viendrait contrebalancer aucun système social protecteur ? Dans une telle société, 5,5 millions d'adultes (ou 4,5 millions si l'on considère qu'1 million d'emplois sont vacants) seraient abandonnés à leur sort, laissés de côté, à mourir à petit feu dans l'indignité la plus totale. Les raisons ? Leur âge, leur manque d'expérience, le fait qu'ils soient trop spécialisés, ou pas assez, qu'ils aient du mal à se remettre de la mort d'un proche, qu'ils aient fait une déprime grave, qu'ils aient eu des enfants ou qu'ils en veuillent, qu'ils s'appellent Mamadou, Fatima ou Mohammed, qu'ils soient défigurés, obèses, handicapés...

Veut-on vraiment d'une telle société ? Réfléchissez-y avant de stigmatiser qui que ce soit. Car les mots ont un pouvoir. Bien trop souvent, ils servent à détruire plutôt qu'à construire.

Petit précis (approximatif) de capitalisme

Le capitalisme est le concept économique sur lequel est fondée notre société. Son principe est l'opposition du capital et du travail. Le capital est la possession d'un stock de richesses que l'on va investir afin d'en tirer un revenu. Le travail est le fait d'exercer une tâche afin d'en tirer revenu. Ou, pour faire le parallèle avec ma définition de début d'article : le fait d'utiliser du temps afin de gagner de l'argent, argent qui permettra de répondre à ses besoins.

Le capitaliste, le possesseur du capital, est le propriétaire de l'appareil de production (l'usine...), qu'il a acheté grâce à son capital. Le capitaliste a besoin du travailleur car c'est le travailleur qui fait fonctionner l'appareil de production et qui permet au capitaliste de générer des revenus. Le travailleur a besoin du capitaliste car il n'a pas les moyens de créer son propre appareil de production. Il est impossible de fabriquer une usine par ses propres moyens, et si l'on fait appel à des employés, il faut être en capacité de payer leur travail. Le travailleur ne le peut pas, le capitaliste le peut. En centralisant les capitaux, il simplifie le processus par lequel on construit quelque chose de collectif, qui dépasse l'individu. En échange de ce service rendu, il obtient le droit de prendre une part de ce que produisent les utilisateurs de l'usine (les ouvriers), sous la forme d'un bénéfice.

Ainsi, dans cette définition, on voit que le capitaliste et le travailleur ont besoin l'un de l'autre. Cette relation d'interdépendance est la garante de l'équilibre du système, et de son équité théorique. L'argent n'étant qu'un représenté du pouvoir, de la capacité à posséder et à obtenir, la richesse du capitaliste lui donne cependant plus de pouvoir qu'au travailleur. Par ailleurs, le capitaliste peut facilement remplacer le travailleur. La réciproque n'est pas vraie, car il y a beaucoup plus de travailleurs que de capitalistes. C'est pour rééquilibrer ce rapport de forces que les syndicats sont nés : en se regroupant, les travailleurs ne sont plus négligeables car ils peuvent impacter fortement sur le travail : l'appareil de production ne fournit plus de revenus au capitaliste si les travailleurs se mettent en grève. On retrouve un rapport de forces équilibré entre le pouvoir issu de la possession, et la capacité des travailleurs à nuire à cette possession par leur inactivité.

Le problème, c'est que nous sommes entrés dans une ère d'ultra-technologie, dans laquelle l'appareil de production n'a plus besoin des travailleurs pour générer des richesses. Le taux de chômage augmente à cause des destructions d'emplois, et le rapport de forces est à nouveau déséquilibré par le chantage à l'emploi devenu possible. Ce déséquilibre est accentué par la centralisation des capitaux : les sociétés sont devenues des multinationales, l'ultra-hiérarchisation verticale empêche le travailleur de défendre son point de vue auprès d'un interlocuteur ayant un véritable pouvoir de décision. La puissance de ces sociétés leur permet d'exercer un lobbying en faveur de lois plus libérales, qui mettent en danger l'équilibre social entre capital et travail. Ce sont les fondements de nos sociétés des XXe et XXIe siècle qui vacillent... car lorsque les travailleurs précarisés n'auront plus les moyens de consommer cette surabondance de biens produits, le capital qui tire bénéfice de cette surconsommation finira lui aussi par s'effondrer.

Conclusion

Le travail est partie intégrante de ce que nous sommes. Nous nous épanouissons à travers celui-ci. Il détermine notre place dans la société. Il nous permet de satisfaire nos besoins et donc, de vivre décemment. Pourtant, il peut également être source de souffrances : nous le subissons parfois, voire souvent. Il est source de stress, parfois même de suicides. Il se déshumanise. Dans certains pays, il s'apparente à de l'esclavage, un esclavage que nous cautionnons en achetant les biens ainsi produits. Il nous déchire, car nous croyons nous sentir mieux en accusant l'autre de nous le voler, de profiter de nous. Nous nous plaignons que le nôtre n'est pas reconnu à sa juste valeur, mais nous rabaissons constamment celui du voisin.

La France crée de la richesse tous les ans (1% de croissance par an). En France, pays des droits de l'homme, l'écart entre les riches et les pauvres se creuse. Notre système social est économiquement un frein dans un marché ouvert où l'amélioration des acquis sociaux n'est pas une priorité.

Tant que le travail sera considéré seulement au travers des indicateurs économiques, la pression sur les travailleurs et les inactifs ne cessera de croître. Cette pression s'accompagnera de précarité, de souffrance et de mal-être. Il est peut-être temps de prendre également en compte les indicateurs sociaux. Il est temps de cesser de croire que quantifier le prix de la santé, de l'éducation, de la recherche, serait le bon moyen pour leur redonner de la valeur. Car le but de la vie ne semble pouvoir se résumer à l'accumulation de biens. Les biens, comme l'argent, n'étant qu'un représenté du vieux concept Néolithique de possession.

dimanche 23 octobre 2016

Nostalgie des temps anciens

Chers lecteurs,

Aujourd'hui j'ai le plaisir de partager avec vous une petite nouvelle sur le thème de la nostalgie. J'espère que vous tirerez autant de plaisir à la lire que j'en ai eu à l'écrire. Vous pouvez également consulter ou télécharger ce texte en PDF pour un meilleur confort de lecture.

Un silence surréaliste planait sur la plaine encore chargée de brume matinale. Sur le chemin de terre mal entretenu, un être de fer et d'acier traversa le paysage, rompant le calme et réveillant brutalement la nature alentour. L'homme, caparaçonné de plates, son casque d'airain à visière vissé sur sa tête, l'étendard brandi bien haut pour afficher ses couleurs, avançait péniblement sous le poids de son armure. Point de monture pour le porter, mais la volonté qu'affichent ces héros dont la quête transcende tout, la fatigue, la douleur, la faim ou la soif. Le guerrier gravit en ahanant la pente qui menait en haut de la colline. Il parvint alors à l'entrée d'une grotte. Fichant sa bannière en terre, il poussa le hurlement de défi suivant, empreint de la noblesse qui caractérise les Braves : "Chale troll, chors de ton antre que ch'te coupe en morcheaux pour t'donner à bouffailler à mes chiens !"

Une silhouette de cauchemar émergea progressivement de l'obscurité de la caverne. Une créature immense, deux à trois fois la taille d'un homme, une peau squameuse à la manière des reptiles, de la même couleur que le roc. Des membres puissants, aux mains épaisses munies d'ongles griffus. Un visage taillé au marteau terminé par une gueule énorme et des dents longues, longues... Le troll déplia ses membres, rendus raides par l'attente, et lança un bâillement qui pouvait au besoin servir de rugissement. Le valeureux guerrier lui fonça dessus en moulinant de sa lame ébréchée. Le monstre ne chercha pas à l'éviter ; tandis que l'énergumène parvenait à portée, dans un cliquetis brinquebalant d'armure rouillée, la créature abattit son poing d'un geste précis né de l'habitude. La mâchoire de l'homme lui rentra dans les talons en un gargouillis sonore suivi d'un geyser de sang ; c'en fut fini du combat épique.

Le troll poussa un nouveau soupir, et une larme perla au coin de son oeil, qu'il effaça d'un revers de sa large paluche. Rien ne servait d'être nostalgique. Le passé était le passé. Il fallait vivre avec son temps. Avancer, continuer à tenir son rôle. Autant de slogans et de dictons qu'il s'était maintes et maintes fois serinés, mais qui ne suffisaient pas à lui redonner son allant d'antan. Les temps avaient changé, certes, et pas en bien...

Le troll se souvenait des combats épiques des temps anciens ; des princesses enlevées dans des châteaux en flammes, des combattants de tous les pays qui accouraient, dans l'espoir de sauver la damoiselle et d'obtenir sa main. Il se remémorait les luttes sanglantes, les duels meurtriers, suivant du doigt avec émotion le contour de telle marque laissée par tel chevalier, de telle cicatrice souvenir d'un combat mémorable. On savait se battre, dans le temps. On se bagarrait avec classe, avec astuce et puissance à la fois. On était capable de rivaliser d'adresse pour rendre ces joutes palpitantes. Et les princesses, de véritables dames au sang bleu et au goût de noisette ou de myrtille. Ca oui, les temps avaient changé !

Le troll retourna dans l'obscurité moite de sa tanière, tandis que le braillement de la princesse poursuivait sa mélopée sonore. Il n'avait pas eu le coeur de la tuer ; elle avait mauvais goût, et puis ses piaillements de désespoir faisaient passer le temps. Plongé dans ses regrets, le troll s'endormit, bercé par les hurlements aristocratiques. Il rêva d'autres temps, d'autres lieux, son visage éclairé d'un sourire apaisé.

samedi 15 octobre 2016

Analogies entre jeu de rôle et jeu vidéo

Aujourd'hui il m'est venu l'envie de comparer le jeu de rôle au jeu vidéo. Cet article est une réflexion personnelle plutôt qu'un article de fond, merci de le lire dans ce sens et avec bienveillance. Je commence par quelques définitions pour expliquer quel sens que je donne aux mots dans la suite de l'article.

Monde ouvert : Un monde ouvert est un monde que le joueur peut explorer librement, sans lieux inaccessibles, sans espaces compartimentés par des temps de chargement et sans zones "couloir". En bref : sans barrières articficielles.

Bac-à-sable : Egalement appelé sandbox. Un jeu bac-à-sable est un jeu dans lequel le joueur se crée ses propres objectifs et dans lequel il n'y a pas une trame scénaristique prédéfinie ou imposée.

Par exemple : Minecraft est un monde ouvert et un sandbox. Certains jeux vidéo peuvent être en monde ouvert mais pas en sandbox, par exemple certains RPG.

Omniprésence du monde ouvert en JDR

On pourrait dire que le développement de la technologie a permis de créer en jeu vidéo ce que le JDR fait depuis des décennies. La plupart des JDR du commerce nous garantissent un monde ouvert bien documenté, à travers un univers encyclopédique détaillé dans le bouquin de JDR. La plupart des JDR du commerce sont construits comme des sandbox, puisqu'on promet aux acheteurs que le système est capable de gérer toutes les situations et de s'adapter à n'importe quel objectif de jeu. Les systèmes de jeu sont de type simulationniste, c'est-à-dire qu'ils mettent en avant leur capacité à gérer l'ensemble des situations de manière cohérente.

Dichotomie entre les jeux et les scénarios

Ces JDR que je qualifie de type bac-à-sable, fonctionnent le plus souvent avec des scénarios linéaires (voir le très bon article d'Acritarche sur les différents types de scénario). C'est-à-dire que la trame scénaristique est définie du début à la fin, par scènes qui sont des passages obligés, comme un couloir que les joueurs sont obligés d'emprunter. Parfois, ces scénarios sont un peu plus sophistiqués et proposent des embranchements, tout comme de nombreux jeux vidéo de type "action-RPG". Il revient alors au MJ (Meneur de Jeu) de pratiquer la technique de l'illusionniste, consistant à donner l'impression au joueur qu'il a le choix, alors que cette liberté est totalement illusoire.

(Illustration issue du blog Serial-ralistes)

J'ai toujours trouvé qu'il y avait une dichotomie incompréhensible, entre le jeu et son scénario dans la plupart des JDR. D'un côté, une volonté de proposer des univers extrêmement détaillés et des systèmes permettant de gérer toutes les situations. De l'autre côté, un cadre restrictif qui supprime toute forme de liberté pour les joueurs, reposant entièrement sur l'habileté du MJ pour faire illusion. Pourquoi une telle dichotomie ? Je n'ai pas la réponse. J'émets une hypothèse : le jeu est conçu comme un monde ouvert et un bac à sable pour le MJ, mais pas pour les joueurs. Monde ouvert et bac à sable sont des arguments commerciaux dans le jeu vidéo tout comme dans le jeu de rôle. C'est le MJ qui achète les jeux, c'est donc lui qu'il convient de convaincre en lui proposant un maximum de liberté. La liberté des joueurs passe au second plan parce que ce n'est pas un argument commercial. L'argument du "on a toujours fait comme ça" doit également être une des raisons.

Problématique du maillage dans le monde ouvert

Le monde ouvert est longtemps resté anecdotique en jeu vidéo ; il s'est développé en même temps que la technologie et avec l'explosion des budgets du jeu vidéo. Si l'on part du principe que le monde ouvert nécessite une plus grande technologie en jeu vidéo, on peut en déduire que cela nécessite également une plus grande technique en JDR : technique au niveau des mécaniques de jeu, mais aussi technique au niveau de la capacité du MJ à maîtriser sa partie.

Pour bien gérer sa partie de JDR, le MJ doit posséder un cadre qui lui permet de maîtriser toutes les situations possibles. C'est ce que j'appelle un maillage : chaque situation possible doit être gérable grâce au scénario, à l'univers ou au système de jeu. Plus ce maillage est fin, plus il permet de soutenir le MJ dans la gestion de la partie. Mais plus ce maillage est fin, plus il est complexe à gérer, et plus il demande au MJ un long apprentissage.

Pour l'exemple : Il est facile pour le MJ de gérer un accouchement difficile s'il y a une règle des accouchements difficiles dans le bouquin. MAIS, cela signifie que : il doit retrouver la règle dans le livre (ou avoir appris 350+ pages par coeur), il doit la lire, il doit faire faire un certain nombre de lancers de dés à ses joueurs. C'est simple, ça guide le MJ, mais c'est lourd, c'est long et ça casse le rythme de la partie.

Comme les JDR de type "monde ouvert" proposent un maillage très fin de la résolution des actions au sein d'un univers extrêmement détaillé, il devient nécessaire de simplifier ce qui peut l'être pour aider le MJ : notamment la gestion du scénario. C'est ainsi qu'au sein du scénario, les situations sont totalement cadrées. Ainsi, le MJ ne gère qu'un petit morceau de ce maillage très fin lors de chaque partie.

Résultat : un jeu élaboré comme un monde ouvert de type bac à sable est joué comme un jeu de plate-formes. J'ai toujours trouvé que c'était un épouvantable gâchis.

(Illustration issue du blog Serial-ralistes)

JDR : à quand de nouveaux horizons ?

Le jeu vidéo connaît une renaissance ces dernières années avec l'émergence de studios indépendants qui proposent des jeux innovants. Ce fut le cas de Minecraft, véritable ovni du monde vidéoludique. On peut en citer plein d'autres : Dwarf fortress, Terraria, Binding of Isaac, Stardew valley, Project zomboid, Out there omega, Don't starve, Risk of rain... Je sépare grossièrement (et un peu arbitrairement) ces jeux en deux groupes : les rogue-like et les bacs à sable. Les rogue-like proposent d'explorer de manière très approfondie une ambiance et une mécanique spécifiques. Les bacs à sable proposent une grande liberté au joueur dans la création de ses propres objectifs et donc, finalement, de son propre jeu au sein du jeu. Je suis grand amateur des deux types de jeu.

Si l'on poursuit le parallèle avec le jeu vidéo, on peut imaginer l'émergence de deux types de JDR :

  • Des jeux "rogue-like", qui proposeraient d'expérimenter une situation ou une ambiance particulières, au travers de parties uniques ou "oneshot". Les mécaniques de jeu n'auraient pas vocation à gérer l'ensemble des situations possibles, seulement celles concernées ou souhaitées par le jeu. Elles seraient spécifiquement conçues pour mettre en exergue certaines problématiques, ambiances ou émotions. C'est ce que je tente de faire avec mon projet Supertension.
  • Des jeux "bac-à-sable", qui proposeraient aux joueurs de créer des parties dans lesquelles ils choisissent eux-mêmes leurs objectifs. Ces jeux peuvent être avec MJ, sans MJ, ou avec MJ "tournant", selon la manière dont on gère l'univers autour des joueurs. Comme on l'a vu, le maillage devient complexe à gérer dès lors qu'il est trop fin. Il faut donc envisager pour ces jeux une résolution d'action simplifiée, un maillage large. Si le maillage est simplifié, cela permet de mettre l'accent sur la création d'outils propres au bac à sable : génération du scénario, mise en place facilitée d'évènements intéressants à jouer, possibilité pour les joueurs de se créer leurs propres objectifs de jeu... C'est ce que je tente de faire avec un autre de mes projets, que je n'ai pas encore rendu public.

Dans la pratique, ces jeux existent déjà : Sombre de Johan Scipion, les jeux du Grümph, ceux des Ateliers imaginaires... Je trouve vraiment dommage que ces jeux ne se démocratisent pas, notamment dans un cadre commercial. Je n'ai pas une vision globale sur cette question ; en tout cas, les rôlistes que je rencontre jouent quasiment tous avec des scénarios-couloirs dans des jeux en monde ouvert.

Note : cet article ne se prétend pas un article de fond mais plutôt une réflexion personnelle. N'hésitez pas à me donner votre avis, je serai heureux d'approfondir ma compréhension du sujet grâce à vous.

mercredi 24 février 2016

Supertension, jeu de société narratif pour 2 joueurs

Le Président du pays adverse est furieux, son doigt tremble sur le bouton de l'arme nucléaire. Vous êtes l'Ambassadeur et il faut absolument que vous calmiez le Président pour éviter un holocauste nucléaire !

C'est le synopsis du jeu sur lequel je travaille en ce moment : Supertension, un jeu de société narratif et tactique sans préparation pour 2 joueurs. Les parties durent 1h à 1h30. L'un des joueurs a un rôle de Meneur de Jeu et incarne le Président furieux ainsi que les membres importants de son gouvernement (que je nomme les "PNJ"). L'autre joueur incarne l'ambassadeur du pays adverse, c'est lui qui vit les enjeux de la partie.

Le jeu est librement téléchargeable dans sa version "bêta" actuelle : règles du jeu et supports de jeu.

Note d'intention : Je réfléchis beaucoup ces derniers temps à l'accessibilité du jeu de rôle. Des personnes de mon entourage, pourtant grandes joueuses de jeu de société, sont hermétiques au jeu de rôle. Il semble que l'interprétation du personnage, et l'investissement émotionnel requis par le jeu de rôle, puissent être des freins pour de nombreuses personnes. De là est née ma volonté de créer un jeu de rôle accessible, sans préparation, à narration encadrée, dissimulé derrière un format de jeu de plateau. Mon deuxième objectif était de faire expérimenter une tension, ici la tension diplomatique sur fond de guerre nucléaire. De ces deux désirs est né Supertension. Plutôt qu'un jeu de rôle classique, il en résulte un jeu narratif et tactique assez gourmand dans l'interprétation de personnage, mais dans lequel la cohérence globale de l'histoire passe au second plan. Chaque tour de jeu est un nouveau dialogue, avec de nouveaux pré-requis. Les scènes de dialogue intègrent un soupçon de narration partagée. Tout cela permet à chacun de se lâcher dans l'interprétation sans s'inquiéter de bien ou mal faire.

Tests du jeu : J'ai réalisé 5 parties-test jusqu'à présent. Les retours de ces premiers tests sont très encourageants. Vous pouvez consulter deux rapports de partie sur le forum des Ateliers imaginaires : ici (clic) et ici (clic). Voir également le rapport de partie n°3 publié sur ce blog.

Je cherche à réaliser des tests supplémentaires : si quelqu'un souhaite tester Supertension, qu'il n'hésite pas à me contacter. Vos avis sur le jeu sont par ailleurs les très bienvenus.

dimanche 7 février 2016

Astuces pratiques pour vivre mieux épisode 1

(Note : Je souhaitais à l'origine faire un seul article. En raison de la longueur du texte, je préfère scinder l'article en épisodes. Je donnerai une courte bibliographie dans un épisode ultérieur)

Cela fait un certain temps que je m'intéresse aux livres de développement personnel. Comme tout un chacun je suppose, j'ai mes peurs, mes blocages et mes moments de déprime. J'ai trouvé dans ces livres, et dans les conseils de ceux qui les lisent, plusieurs astuces pratiques qui fonctionnent sur moi. Ces astuces sont efficaces et très simples à mettre en place. Elles m'aident au quotidien à vivre mieux. J'espère qu'elles vous aideront aussi.

Je vous présente ci-dessous, la première de ces techniques. Avec le nom barbare qui va bien.

La rétrospection journalière pré-nocturne positive

La rétrospection journalière pré-nocturne positive (ha ha !) est une petite activité très simple à réaliser. Elle se pratique chaque jour au moment du coucher, alors que vous vous êtes glissé dans votre lit, et que vous vous apprêtez à dormir. Eteignez la lumière. Fermez les yeux. Remémorez-vous les bons moments de votre journée. Seulement les bons moments. Ca peut être un bel homme ou une belle femme croisés dans la rue, une pâtisserie délicieuse prise au petit déjeuner, une conversation intéressante avec un collègue. Ca peut être n'importe quoi, ça n'a pas besoin d'être important. Il suffit que vous considériez la chose comme bonne, agréable ou positive pour vous.

Annoncez à voix haute ces évènements, l'un après l'autre, en indiquant en quoi cela vous a évoqué un sentiment positif. Par exemple : "Cette pâtisserie était délicieuse, j'ai vraiment passé un bon moment en la mangeant, elle m'a rappelé les desserts de ma grand-mère." Vous devez en annoncer au moins 3, mais il est conseillé d'en dire le plus possible. Terminez en affirmant : "aujourd'hui a été une bonne journée. Aujourd'hui a été une vraiment bonne journée."

Pourquoi la rétrospection journalière pré-nocturne positive est-elle efficace ?

  • Parce qu'elle prend peu de temps, parce qu'elle est concrète. Une solution que vous n'appliquez pas ne peut pas fonctionner, et cette solution est facile à appliquer.
  • Parce qu'elle vous oblige à modifier votre perception des choses. Nous avons tous des croyances, un filtre que notre cerveau met entre la réalité que nos 5 sens captent, et notre conscience. Ce filtre modifie l'interprétation que nous faisons de la réalité. Ce filtre génère nos sensations, nos angoisses, notre mal-être, notre déprime. En mettant l'accent sur le positif, cette technique ancre dans notre crâne que tout est affaire de perception. Elle modifie notre filtre pour nous faire vivre positivement les choses. Elle nous apprend à devenir maîtres de la manière dont nous voulons percevoir les choses. Elle nous prouve que les choses sont souvent bien plus positives qu'on les voit.
  • Parce que le cerveau classe les informations de la journée pendant le sommeil. En intervenant au moment du coucher, cette technique vous met dans une situation d'apaisement. Votre cerveau, ancré dans un mode de perception positif, colore positivement vos souvenirs de la journée. Vous dormez mieux, plus sereinement. Le lendemain, vous êtes en meilleure forme avec le sentiment légitime que vous êtes sur la pente ascendante. Que vos problèmes sont en train de se résoudre.

Je vous invite à tester cette technique et à me dire si elle a été efficace pour vous. Pour ma part, je vois une nette différence depuis que je me prête au jeu chaque soir.

jeudi 4 février 2016

Je suis l'artiste-codeur de mon existence

J'ai regardé hier deux vidéos qui m'ont amené à réfléchir au déterminisme social et au libre-arbitre de l'individu dans notre société. Ces deux vidéos ne sont pourtant pas celles de philosophes expliquant leurs derniers travaux de recherche.

La première vidéo, réalisée par Scilabus, parle du Temps. Je vous invite à la regarder afin de comprendre la suite de cet article :

Le temps, donc, n'est jamais qu'une représentation quadridimensionnelle de toute chose, objet ou individu. Une représentation quadridimensionnelle que nous ne sommes pas capables d'appréhender. Nous avons créé le temps pour nous permettre de comprendre comment les objets et les individus évoluent en fonction de cette quatrième dimension.

La deuxième vidéo est un épisode de la série Mr Robot (je vous invite par ailleurs à la regarder car elle est très sympathique). Dans l'un des épisodes, l'un des personnages associe nos décisions à un système booléen : Le oui étant le 1, et le non étant le 0. Nos choix, aussi complexes soient-ils, se résumeraient ainsi à une variable à deux entrées : 0 ou 1. Plus généralement, cela m'a amené à penser l'être humain, nos vies, comme un programme informatique qui serait une succession de décisions : une suite de 0 et de 1, comme en informatique.

L'association de ces deux concepts est formidable. D'une part, la vidéo de Scilabus nous informe que nous sommes des objets de forme finie, en 4 dimensions. Une forme que nous ne pouvons percevoir, mais qui existe néanmoins. Par ailleurs, nous avons une prise directe et totale sur cette forme : nos choix codent le programme informatique de notre vie. C'est la grande force de l'être humain, que d'être capable d'écrire son propre programme. Si je choisis le suicide, je marque définitivement dans le temps et l'espace, dans l'univers, une modification de l'objet en 4 dimensions que je suis. Si je choisis de vivre d'une façon ou d'une autre, si je choisis de changer de métier, de partir à l'étranger, ce sont autant de 0 ou de 1 qui viennent s'ajouter dans le programme de ma vie, et qui modifient définitivement le code de mon existence.

Bien entendu, nous sommes également parasités par le système social dans lequel nous vivons. Nos décisions ont pour limite l'influence extérieure que nous subissons, notre accès à l'information, notre éducation, des évènements indépendants de notre volonté. Nous sommes piratés en permanence... Il n'empêche qu'à tout moment, quelles que soient les pressions, quels que soient les aléas dans notre vie, nous avons le choix de poser un 0 ou un 1 dans le code de notre existence. Il suffit d'un 0 ou d'un 1 pour reprendre la main. Il suffit d'un 0 ou d'un 1 pour modifier la forme que nous prendrons dans la 4e dimension.

Et vous, quelle forme voulez-vous prendre dans l'existence ? Coderez-vous le programme de votre vie, vous donnerez-vous forme, tels des artistes ? Ou vous laisserez-vous pirater par les autres ?

jeudi 14 janvier 2016

Hommage républicain

Débat démocratique...
Ils te débitent d'un ton débilitant leurs dictons étiques.
Ton vote compte, c'est ce qu'ils te racontent,
Et toi t'es con, tu succombes à leur faconde.
Ils te pondent des discours, dix par jour,
Les lieux communs abondent.
Technocrates professionnels,
Ils te niquent de leurs techniques d'arrivistes confessionnels.
Leur passion ? Asseoir leur position,
La tienne c'est le séant dressé vers le ciel.